Les caractéristiques du gothique et les solutions qu’il apporte

Les cathédrales gothiques ont une structure particulière. Le plus souvent en forme de croix, elles comportent plusieurs parties : la nef et ses bas-côtés, le transept, le chœur puis l’abside et le déambulatoire.

Afin d’atteindre des hauteurs toujours plus élevées, des changements architecturaux dans le gothique sont impératifs car les bâtisseurs ont atteint les limites du roman. Dans les constructions romanes, les arcs, stabilisés par la clef d’arc, supportent le poids de la voûte et le rejettent sur les murs. A mesure que l’on élève l’édifice, le poids augmente de même que l’épaisseur des murs . Cette épaisseur est visuellement accrue par l’ajout de contreforts permettant de contenir les effets de la poussée des arcs et voûtes en plein cintre. La massivité des murs devient alors problématique dans cette quête de hauteur. Un nouveau type d’arc est donc adopté : l’arc ogival. Il atteint son apogée avec l’arc en tiers point dont la construction est explicitée par Villard de Honnecourt dans ses carnets.

Construction de l’arc en tiers point
Dessin de Villard de Honnecourt exposant comme construire différents arcs à l’aide d’un compas.
Construction géogébra reproduisant le dessin de Villard de Honnecourt

Ses croquis montrent qu’en gardant une même ouverture de compas on peut obtenir les différents arcs utilisés par les bâtisseurs. L’arc plein-cintre est obtenu en traçant un simple demi cercle et l’arc brisé en divisant la ligne en trois parties. L’arc en tiers point est obtenu pour sa part en divisant par quatre le diamètre de l’arc plein cintre, et en traçant deux arcs de cercle à partir du premier et troisième point. Ces arcs reposent sur des piliers et allègent ainsi le poids supporté par les murs. Ces derniers peuvent donc s’affiner et laisser place à des vitraux. Il suffit désormais d’élever les piliers pour rehausser les voûtes et créer ces grands volumes caractéristiques de l’architecture gothique. De plus, les épais contreforts sont remplacés par des arcs boutants reportant la poussée des voûtes sur des piliers éloignés du mur appelés piliers de culée. Ces nouvelles techniques architecturales s’inspirent cependant de plus anciennes. Elles rassemblent, en effet, les caractéristiques d’anciens édifices en les améliorant pour les mettre au service de ses besoins. Le modèle de l’arc brisé existe dès le néolithique. Celui de l’arc boutant est déjà présent en demi-boutant pour supporter les voûtes romanes les plus lourdes. Enfin, on retrouve celui des croisées d’ogives en 1049 pour la première fois dans l’église romane Saint-Hilaire de Poitiers. C’est donc en améliorant des techniques déjà existantes que les bâtisseurs répondent parfaitement aux attentes et volontés de l’époque en conférant solidité, finesse et hauteur aux cathédrales gothiques. Elles permettent en effet de baigner les nouveaux édifices de lumière en y invitant de nouvelles formes d’art comme celui du vitrail.

De grandes ouvertures étant désormais possibles, les vitraux deviennent de véritables chefs d’œuvre qui habillent les édifices et permettent la louange de Dieu. Ce sont des pièces de verre, encastrées dans des baguettes de plomb préalablement assemblées de manière à respecter le dessin d’origine. L’élaboration et la découpe des pièces de verre est un long et minutieux processus. Ce sont d’abord des feuilles entières de verre coloré qui sont produites grâce à un mélange de deux tiers de cendre et un tiers de sable, d’après le traité du moine Théophile du XIIe siècle. C’est après chauffage, coloration et soufflage que le maître verrier aboutit à de véritables feuilles de verre. Les découpes sont ensuite effectuées par chocs thermiques puis finalisées au grugeoir, outil en forme de pince.  L’élaboration de vitraux demande temps et argent. Les rois et riches personnalités ont donc parfois fait des donations pour doter les cathédrales de ces oeuvres de lumière. A Chartres, par exemple, la rose Nord a été offerte par la régente Blanche de Castille. C’est d’ailleurs à Chartres qu’est conservé l’un des plus beaux ensembles de vitraux. On y trouve plus de 2600 m² de verrerie et une rosace de 10 mètres de diamètre. Ces chiffres illustrent bien l’importance que prend cet art qui remplace désormais les peintures murales tout en perpétuant le même esprit de la construction.

Rose Nord de Chartres

Transept Nord – Rose avec la Vierge Marie tenant l’Enfant Jésus en son centre et vitraux aux armes de France et de Castille – MOSSOT – août 2010

Les vitraux sont en effet la parole des hommes adressée à Dieu. Leur but est autant esthétique que didactique car ils expliquent la Bible à une population majoritairement illettrée. Pour aider à la compréhension de ces chefs d’œuvre, des couleurs symboliques sont utilisées. Le jaune, par exemple, désigne le traître, ou Judas. Le marron désigne les pauvres, et le bleu Dieu et Marie. Les vitraux permettent également de plonger le pèlerin dans une atmosphère digne de la Jérusalem céleste. Les rayons du soleil qui traversent le verre sans le briser sont assimilés “au Verbe divin, à la lumière du Père qui est passé à travers le corps de la Vierge.” Le vitrail unit les deux mots latins pour lumière : “lumen” correspondant à la lumière physique et “lux” désignant la lumière divine. Les vitraux, parfait mélange entre technique et foi,  sont donc des témoins de la religion et de sa pratique à l’époque.